Jason leva les yeux du livre qu’on lui avait donné pour regarder les flocons tomber derrière les fenêtres. Cela faisait plusieurs mois que lui et Mr Leicester se voyaient le mercredi après-midi pour des cours de rattrapage en lecture et écriture. Depuis qu’il avait pris la décision de poursuivre ses études, mais constaté qu’aucuns de ses professeurs ne pouvaient l’aider, parce qu’ils devaient tous suivre leur satané « programme » et n’avaient pas de temps à perdre avec lui. Il s’estimait chanceux que le bibliothécaire ait bien voulu l’aider, et sans rien demander en retour en plus. C’était vraiment gentil de sa part, et ça l’aidait beaucoup. D’habitude, Jason faisait de son mieux pour suivre les leçons, mais aujourd’hui, il était beaucoup plus troublé.

C’était à cause de ce qui était arrivé le lundi précédent, avec Winter. En voulant sauver sa caméra, il avait fait quelque chose, l’appareil avait flotté dans les airs un court instant avant qu’il ne le récupère. La scène s’était gravée dans son esprit, il la revoyait encore nettement alors que son regard fixait le vide entre les carreaux des fenêtres. C’était très précis, et en même temps il avait l’impression d’avoir rêvé, parce que ça n’était simplement pas possible. Il avait d’ailleurs tenté plusieurs fois de réussir à nouveau ce prodige, mais en vain. Est-ce que c’était vraiment lui qui avait fait ça ? Beaucoup de questions se bousculaient dans sa tête, mais aucunes certitudes. Il avait pourtant tellement besoin de réponses en ce moment même. Soudain, il sembla comme se réveiller, il regarda son livre, puis Mr Leicester.

« Pardon. Tu disais ? »

Se passant rapidement une main sur le visage, il tenta de reprendre le fil de la leçon. Les livres, c’était un peu son cauchemar depuis qu’il était tout petit. Il avait vraiment du mal, même si les choses s’étaient sensiblement améliorées à présent. Et si cette bibliothèque pouvait l’aider à comprendre ce qu’il lui arrivait en ce moment ? Les livres contenaient des tas d’informations sur des tas de sujets différents, après tout, et il en avait lu si peu. Peut-être était-il passé à côté de quelque chose d’essentiel, dont il aurait bien besoin aujourd’hui. Il y réfléchit.

« Dis, tu as lu plein de bouquins dans ta vie, non ? »

Ça semblait être une évidence, Jason était presque sûr que Jason avait fais des études littéraires, ça se voyait à sa façon de lui apprendre les choses. Il devait avoir une culture phénoménale.

« T’en connaîtrais pas un sur… le cerveau ? Mais genre, sur ses capacités… sur ce qu’on peut faire avec son esprit. Je sais pas trop comment dire. »

Disons plutôt que l’adolescent voulait avoir une réponse, mais sans trop en dire sur ce qui lui était arrivé et sur le genre de capacités que pouvaient avoir son esprit. C’était un exercice de subtilité auquel il ne se sentait pas très doué.

« Ça doit être des livres compliqués, j’imagine. »

L’autre problème qu’avait Jason avec les livres, c’était qu’ils sapaient toute sa confiance en lui. Il avait toujours tendance à penser qu’il n’arriverait jamais au bout, et voulait abandonner dès qu’il tombait sur un mot inconnu. Il ne se sentait clairement pas près à lire de la littérature scientifique, même avec toute sa volonté de découvrir ce qu’il lui arrivait. Mais si le bibliothécaire en avait lu, il pourrait peut-être lui en parler. Est-ce que la science l’intéressait ? Il n’en avait aucune idée. En fait, ils n’avaient jamais vraiment discuté l’un et l’autre en dehors du cadre des leçons. Mr Leicester n’était pas franchement bavard, et Jason n’avait pas forcément envie de l’embêter avec des choses qui n’avaient rien à voir avec ce qu’il apprenait. C’était une grande personne qui vivait sa vie, il n’avait pas à fourrer son nez là-dedans.

« Désolé, je suis pas très concentré aujourd’hui. Ça va passer. »

Jason tenta de se replonger dans le livre qu’il avait toujours dans les mains, il n’avait pas changé de page depuis un moment maintenant. Il regardait les mots, tenta de les lier entre eux et d’avancer. Mais rien à faire, cette fichue caméra occupait son esprit, et il se retrouvait bien souvent à relire la même phrase en boucle. Un peu agacé, il poussa un soupir, et releva les yeux vers les fenêtres. Les quelques flocons qui tombaient il y a un instant avait laissé place à une vraie tempête, et il s’amusa un instant à regarder les passants galérer là dehors. Oubliant qu’il faudra bien qu’il sorte aussi à un moment donné.

« …pouvoir faire potentiellement bouger des objets avec son esprit… » Jason écarquilla les yeux un instant, est-ce qu’il avait laissé échapper quelque chose qui aurait pu lui faire penser que… Non, non, c’était juste une coïncidence. Ou alors Jason lisait dans les pensées, mais ça n’existait pas la télépathie, n’est-ce pas ? Pas plus que les caméras volantes. Rah, il ne savait plus vraiment où il en était, tout semblait aller de travers depuis qu’il avait croisé cette étrange créature dans l’étable de sa ferme, au début du mois. Non, en fait tout allait de travers depuis la disparition, mort, et résurrection de Will Byers. Jason n’avait aucune idée de ce qu’il s’était passé, mais il sentait de plus en plus que quelque chose se tramait. Quelque chose d’étrange à laquelle personne n’était préparé. Il regarda Jason un instant, est-ce qu’il ressentait la même chose que lui ? Est-ce qu’il faisait semblant d’être calme comme c’était son cas, ou est-ce qu’il était le seul à avoir parfois l’impression de devenir fou ? Parce qu’il n’y avait pas que ça, il y avait les animaux morts qu’il retrouvait régulièrement dans la forêt depuis quelque temps, et ses parents, surtout sa mère. Elle le surveillait comme jamais, il avait d’ailleurs dû lui donner des explications avant de partir pour la bibliothèque tout à l’heure. C’était de plus en plus dur pour lui de faire comme si de rien n’était avec tout ce qu’il se passait autour de lui, mais en même temps, même si c’était difficile pour lui, il avait de moins en moins confiance en elle. Il sentait bien qu’elle ne devait pas savoir pour ses « pouvoirs », ou quoi que ça puisse être. Personne ne le devait.

Étrangement, le bibliothécaire était un bien meilleur enseignant que certains des professeurs qu’il avait connus. Contrairement à eux, lui était à l’écoute de son élève, et ne cherchait pas à forcer les choses s’il voyait que ce n’était pas vraiment le bon moment. Jason lui en fut reconnaissant, et le laissa fermer les livres devant lui sans broncher. Il avait pas mal progressé ces dernières semaines, il pouvait bien faire une pause une fois de temps en temps. Son professeur improvisé lui demanda ensuite s’il avait d’autres questions. Pfiou, il n’avait pas idée. Des questions, Jason en avait des tas, surtout avec ce qu’il se passait autour de lui ces derniers temps. Mais est-ce qu’il pouvait vraiment les poser ? Ça il en doutait fort. Même avec toute la culture du monde, Jason n’aurait de toute façon pas pu lui répondre. Après s’être donné quelques instants de réflexion, l’adolescent tenta quand même.

« Est-ce que vous avez une idée de ce qui est arrivé à Will Byers ? Parce qu’on raconte quand même que ce gamin à ressuscité ! Ça devrait faire les gros titres encore aujourd’hui, le monde entier devrait s’intéresser à Hawkins avec un truc pareil. Je veux dire, la dernière personne qui a ressuscité avant lui, c’était y’a deux mille ans et on en parle encore. Mais là, on dirait que tout le monde s’en fout. Y’a que moi que ça choque ? »

Jason s’était tourné vers… Jason [décidément c’est perturbant ces prénoms xD], l’air à la fois intéressé et incrédule. Et puisque garder toutes ces choses pour lui commençait à lui peser, il finit par lâcher.

« Il y a une bête dans les bois, qui tue, elle a attaqué ma ferme et je trouve plein d’animaux mort là-bas quand je vais me balader. Et… je suis presque sûr d’avoir vu un mec faire voler un objet. Ouais, voilà, j’ai vu un mec faire voler une caméra juste comme ça, on se serait cru dans un film… »

Oui, il avait vu un mec, la technique était un peu grossière, mais après tout ça pouvait passer. Jason s’était remis à contempler les fenêtres, il n’était pas sûr de vouloir voir la réaction du bibliothécaire à ce qu’il venait de raconter. Il allait sûrement le prendre pour un fou, ce serait le plus logique. C’était la première personne à qui il se confiait, un bibliothécaire tout à fait normal, et c’est ce qu’il allait marquer sur son bout de papier. Jason est cinglé.

« Lazare ? »

Pour être honnête, Jason ne connaissait pas du tout cette personne. En parlant de résurrection, il avait pensé à Jésus, évidemment, mais peut-être n’avait-il pas existé ? L’adolescent n’avait reçu aucune éducation religieuse, sa mère abhorrait la religion plus que tout, alors il devait bien reconnaître sa plus parfaite ignorance en la matière. Il resta pensif un moment, c’est sûr que tout ça était on ne peut plus étrange, et le reste de ce qu’il avait à dire n’arrangeait rien. Mais le bibliothécaire restait parfaitement calme, notant quelques petites choses de temps à autre. C’était sûrement pour ça qu’il se confiait à lui, parce qu’il restait serein, parce qu’il lui apportait une impression de stabilité au milieu du tourbillon qui balayait son esprit. Jason regarda néanmoins son papier, se demandant ce qu’il écrivait, mais ses lunettes étaient sur la table et il se voyait mal les remettre juste pour espionner. Il serait grillé d’avance.

Il hocha simplement la tête en entendant Jason parler d’un animal qui aurait pété les plombs et se serait mis à tuer au hasard. Il aurait aimé que cette théorie soit la bonne, mais il savait, après ce qu’il avait vu et sa conversation avec Alexander Woods, que ce n’était pas si simple. Ils avaient à faire à quelque chose d’encore inconnu, d’hostile, et Jason avait bien raison de lui dire de faire attention. Pour le coup de la caméra volante, par contre, son professeur manquait d’explications rationnelle, mais il lui avait dit qu’il le croyait, c’était déjà ça. Il pouvait mentir, mais son calme apaisa un peu les battements affolés de son cœur. Il semblait au moins le prendre au sérieux, ce qui n’était pas rien pour lui. Les yeux encore tournés vers les fenêtres, Jason approuva d’un nouveau signe de tête quand il lui dit que ce devait être terriblement effrayant. Il n’avait pas idée à quel point ça l’était pour lui. Les questions qui suivirent résonnèrent longtemps dans sa tête. Que peut-il faire d’autre ? Est-il le seul ? Si seulement il pouvait le savoir.

Il y eut un moment de silence, Jason aurait voulu dire quelque chose, mais il ne voyait pas vraiment quoi. Son regard se tourna simplement vers la feuille que le bibliothécaire continuait de remplir. Il se demanda s’il comptait parler de tout ça à quelqu’un. Est-ce qu’on le croirait de toute façon ? C’était un adulte, il était sans doute plus crédible que lui, mais ça n’empêchait pas ces histoires d’être incroyables. Quand il lui demanda ce qu’il pensait de tout ça, Jason poussa d’abord un soupir. À dire vrai, ça l’épuisait un peu, il n’arrêtait pas de réfléchir depuis que ces évènements étranges lui arrivaient. Il remettait les choses en questions exactement comme Jason venait de le dire, et ce n’était pas une chose agréable à faire. Parce qu’avec un peu de réflexion, il n’était pas difficile de mettre le monde à l’envers, de tout déconstruire. Certains disaient que la science avait presque atteint sa limite, qu’on avait tout découvert ou presque, ils se trompaient. L’univers était encore un grand mystère, ou tout était possible, même l’impensable.

« Je pense qu’il se passe quelque chose, et qu’un jour ça va nous péter à la tête sans qu’on s’y attende. »

Jason tripota ses lunettes, les faisant tourner entre ses doigts, l’air profondément pensif.

« Pour les disparitions et les résurrections, je ne sais pas, sincèrement. On en sait trop peu, il pourrait être arrivé n’importe quoi. Et puis pas sûr que les sources soient très fiables. La bête, c’est sûr qu’il faut faire gaffe, j’ai vu moi-même les dégâts qu’elle peut faire et c’est pas beau à voir. J’éviterais d’aller dans la forêt sans arme personnellement. Et ce gars… »

Lâchant ses lunettes, il croisa ses mains sous son menton, un peu ailleurs.

« Tout ce que je connais de ce genre de pouvoirs, je l’ai lu dans des comics. Ça pourrait être génétique, mais d’après le peu que j’ai retenu de mes cours de biologie, il faudrait des milliers d’années pour arriver à une évolution de ce genre. Après il y a aussi les expositions à des produits chimiques, des drogues, ce genre de chose. Allez savoir… »

Ça lui apparut nettement tout d’un coup, des couloirs blancs comme ceux d’un hôpital, des salles carrelées jusqu’au plafond. Et ce numéro, ce foutu numéro qu’il avait au bras. Est-ce que tout ça avait un lien avec tout ce qu’il se passait en ce moment autour de lui ? Il ne pouvait s’empêcher de penser que c’était sans aucun doute une possibilité. Peut-être que demander d’où il venait à ses parents pourrait aider. Mais il l’avait déjà fait, quand il était plus jeune, et n’avait jamais obtenu de véritables réponses. Le faire maintenant ne ferait qu’attirer inutilement l’attention sur lui, et Dieu sait qu’il n’avait pas besoin de ça en ce moment. Il n’avait littéralement personne à qui parler, sauf Jason, qui était maintenant dans la confidence. Il regarda à nouveau le bibliothécaire, et sa feuille de papier.

« Vous allez parler de tout ça à quelqu’un ? Je sais pas si vous me croyez vraiment, je comprendrais que ce soit pas le cas, mais si vous pouviez éviter de le dire à d’autres… »

L’idée qu’il le raconte l’inquiétait assez, qui sait ce qu’il pourrait se passer si ces histoires venaient à être connues de tous. Surtout celle du gars et de ses pouvoirs, il ne manquerait plus qu’on vienne lui demander plus d’informations sur lui, voire son nom, que ferait-il à ce moment-là ?

« Oui, comme les x-men. »

Jason ne put s’empêcher d’avoir l’air surprit. Le bibliothécaire, qui venait de lui expliquer qui était Lazare, connaissait aussi les comics ? Et un peu de science aussi, la culture de certains semblait vraiment sans limites, il ne savait pas comment ils faisaient. Lui avait vraiment l’impression d’être très limité, à part le travail à la ferme, la chasse, des choses très pratiques, il n’avait pas le sentiment de savoir grand-chose. Peut-être qu’un jour ça changerait, s’il continuait à suivre les leçons, il pourrait se mettre à lire sérieusement et rattraperait son retard. Qui sait, il avait encore bien le temps pour ça. Un court silence s’était installé entre eux avant que l’adolescent ne lui demande s’il comptait parler. Il retint son souffle en attendant la réponse, tendu. Son soulagement fut immense quand il lui répondit que non, et qu’en plus il le croyait. Un sourire se dessina sur son visage quand il vit les mots écrit en langue étrangère.

« De l’arabe et du danois ? Impressionnant. »

Jason regarda surtout les mots en arabe, qui étaient vraiment très jolis même si bien sûr il ne pouvait pas les lire. Ça le rassura énormément de voir que son professeur était apparemment quelqu’un de fiable. Il avait envie de lui faire confiance, de tout lui avouer, mais ce n’était pas une chose facile à faire même face à quelqu’un comme lui. Jason se remit à tripoter ses lunettes, se demandant comment agir. Il avait déjà dévoilé pas mal d’information compromettantes, mais son mensonge lui pesait, alors il ajouta avec une pointe d’appréhension.

« Le gars dont je vous parlais, c’est moi. Je sais pas ce que j’ai fais et je sais pas comment le refaire mais, voilà… »

Il haussa les épaules, pour tout avouer, il aurait préféré que ce qu’il s’est passé soit un simple rêve, mais il savait que non. Lui, Jason Fitzgerald, avait fait léviter un objet, ça lui avait vrillé le crâne, mais il l’avait fait. Il avait bien tenté de recommencer, mais ça n’avait rien donné de concluant, même pas une petite migraine. Alors il cherchait, ce qui avait pu faire que ça marche, comment ça pouvait fonctionner, d’où ça venait. Si seulement il pouvait obtenir juste une ou deux réponses, sa vie changerait du tout au tout, mais partout où il regardait, tout était absolument normal. Dans son monde, ce genre de dons, c’était de la pure fiction, alors quoi ? Il ne savait pas quoi faire ni vers qui se tourner. Il n’était même plus sûr que savoir qui il était, comme si toute sa vie était construite sur des mensonges, et tous ces doutes commençaient à sérieusement le terrifier. Les x-men, ils étaient cool, mais aussi détestés par pas mal de gens, et puis eux au moins ils n’étaient pas seuls au monde. C’était peut-être ça le pire dans cette histoire. Que n’aurait-il pas donné pour simplement retomber dans l’ignorance, et continuer à vivre sa vie banale sans se poser plus de question.

Le silence était retombé entre eux deux, Jason ne savait pas vraiment quoi ajouter après sa dernière révélation. Il se contentait de regarder d’un œil peu intéressé les rares personnes qui avaient osé affronter la neige dehors pour venir à la bibliothèque. Finalement, il se leva, cherchant des yeux le rayon des livres scientifiques. Il doutait un peu qu’ils soient d’une aide quelconque mais c’était la seule piste qu’il avait pour le moment, alors autant la suivre.

« Ils sont où, les bouquins dont on parlait. J’essaierais de les lire chez moi. Ça sera déjà un début. »

Peu importait ce qu’il trouverait, Jason ne pouvait juste pas rester inactif face à la situation. Il comptait bien comprendre ce qu’il se tramait, de préférence avant qu’il soit trop tard.

Sa mère lui parlait égyptien… Est-ce que c’était pareil que l’arabe ? Jason se posa la question dans sa tête quelques secondes, mais ne l’interrogea pas. Pas plus qu’il ne lui demanda comment il avait pu arriver d’Egypte et atterrir dans une petite ville comme Hawkins. C’était toujours curieux pour lui qui avait toujours vécu dans ce qui lui semblait être un trou perdu au milieu d’une forêt. Mais c’était peut-être ce qu’il était venu chercher, un endroit calme, un peu comme lui. Même si cette tranquillité lui paraissait toute relative dernièrement.

Le calme de Jason d’ailleurs, parlons-en, il était rassurant c’est vrai, mais l’adolescent commençait à se demander si ça n’était pas qu’une façade. Entendre que quelqu’un à des super-pouvoirs, et se contenter de hausser les épaules, c’était assez surprenant au final. L’adolescent se demandait du coup ce qu’il se passait réellement dans sa tête. Et s’il avait peur de lui en réalité, ou le prenait pour un fou, mais n’osait pas le montrer ? Il avait forcément un jugement sur la situation, ce n’était pas possible que ça ne lui fasse rien. Ou alors il devenait simplement parano ? Ça ne l’étonnerait même pas, avec tout ce qu’il se passe. En tout cas, Jason ne voyait pas ce qu’il pouvait dire de plus sur le sujet pour le moment, même s’il avait voulu. Il n’en savait pas assez lui-même pour en rajouter, et puis ça lui avait déjà beaucoup coûté de dire ce qu’il avait à dire, même si c’était un peu un soulagement d’avoir vidé son sac.

Se lever et aller chercher les livres lui permit de penser un peu à autre choses. Il se sentait un peu détective tout à coup, c’était peut-être une meilleure façon de voir la chose. Suivant Jason dans les rayonnages, il le laissa choisir des livres en regardant les couvertures de son côté. Ça avait vraiment l’air d’être des trucs compliqués et Jason se demanda s’il serait bien capable de lire ça. Au moins il essaiera, qui sait, peut-être que ça sera plus simple qu’il ne se l’imagine.

« Merci. »

Jason prit les livres que le bibliothécaire décida de lui donner. La leçon était finie depuis un moment, et il n’avait pas grand-chose de plus à dire, mais quand il regarda en direction de la porte pour éventuellement en rester là et partir, il vit la neige tomber de plus belle, dans des bourrasques de vents furieux.

« Je vais peut-être par rentrer tout de suite. J’aime vraiment pas ce temps. »

Malheureusement pour lui, la neige ne semblait pas prête de s’arrêter, mais il gardait l’espoir que les choses se calment un peu. On pourrait rêver. Puisqu’ils risquaient de rester là encore un moment, et qu’il était toujours curieux, Jason finit par demander.

« Vous venez d’Egypte, alors ? C’était bien là-bas ? »

Bien sûr, il était tout à fait possible que Jason soit né aux États-Unis, mais ça faisait quand même plus rêver de l’imaginer venant de ce pays lointain, avec ses pyramides et son sphinx. Ah, il ne devait pas avoir de problème de neige là-bas.

« Comment vous vous êtes retrouvé à Hawkins ? Enfin, vous êtes pas obligé de répondre, je suis juste curieux. »

Finalement, Jason avait cédé à sa curiosité, il ressentait le besoin d’en savoir un peu plus sur cet homme à qui il venait de se confier. Après tout, le bibliothécaire lui avait toujours parut assez mystérieux.