Oui l’insulte lui avait échappé au récit du mauvais traitement que lui faisait part le jeune homme. Dans son centre on le traitait vraiment aussi mal . Comment pouvait-on agir ainsi ? Surtout que le gars semblait pas du genre agressif du tout. Il dégageait beaucoup de simplicité et de douceur, même… un caractère très enfantin… alors pourquoi ?

« Putain de merde. »

Répéta alors Treize, il n’était plus un enfant, logiquement, donc il avait le droit de dire ce genre de mot, mais sa façon de le prononcer faisait vraiment petit garçon, qu’Alex avait du mal à assimiler. Oui ça faisait bizarre, il eut bien du mal à ne pas lui dire « Faut pas dire ça »… Putain ce gars le perturbait un max en réalité.
Sa douleur aux bas-ventres passait, et c’était tant mieux, il devait aussi songer à finir de se préparer car l’heure d’ouverture du cabinet en bas se rapprochait inexorablement.

Devait-il vraiment faire des recherches sur lui ? Fouiller les avis de fugues ou de disparitions au poste de police . Au vu de ce qu’il venait de lui confier sur la vie là-bas… Le véto doutait de plus en plus.
Il y avait aussi cette bête, ce qu’il avait pu voir, dans l’obscurité et sous un faisceau lumineux d’une torche, le rendait perplexe. La face étrange de la bête semblait comme imprimé dans son crâne, mais il n’expliquait pas l’espèce, la race, l’origine d’un tel animal. Il espérait que son protéger en saurait plus mais au final… Non…
Ce qui était sûr c’est qu’elle correspondait au témoignage qu’il avait reçu des éleveurs, de tous ceux qui avaient été victimes d’une attaque sanglante étrange.

« Oui, très réelle, dangereux. »

Il plissa doucement les yeux, ses sourcils sombres et épais soulignant son air soucieux.

Oui j’ai cru le sentir… Dommage que tu n’en sait pas plus. Je tâcherais de faire des recherches dans les archives informatiques. Il semblerait que c’ait bien celle qui s’attaque aux bétails des fermiers aux alentours.

Il se leva de la table et commença donc à ranger quelques affaires utilisées pour le petit déjeuner.
Puis comme le jeune homme allait rester ici un petit moment, Alexander proposa d’utiliser un prénom différent. Quelques choses de moins bizarre, plus commun, plus passent partout.
Il en proposa au jeune homme, des prénoms commençant par la lettre T pour faciliter les choses. Un des prénoms sembla plaire à son nouveau coloc :

« Timothey ? Timothey, c’est bien ! »

Si ça te plaît tant mieux. Confirma donc Alex avec un grand sourire.

Le prénom était choisi, c’était une bonne chose, maintenant le véto devait songer à affronter une nouvelle journée. À sa pause-déjeuner il irait quand même vérifier les annonces de disparition et de fugue. Juste au cas où, mais il n’irait pas direct parler au shérif ou au flic de Treize. Il aviserait plus tard ce qui serait mieux. Le fait qu’il parle de maltraitance l’avait bien refroidi. Il trouvait qu’effectivement Treize… enfin non Timothey ne respirait pas la grande forme physique.
Alexander commença à ranger un peu la cuisine, son nouveau « coloc » du moment semblait claquer un peu ses attitudes sur les siennes.

« Si je reste, j’aide. »

Il s’était effectivement levé pour aider sauf que… Il fit léviter tout ce qui restait sur la table à travers la cuisine. Alex qui terminait de poser les couverts dans l’évier, les lâcha un peu plus brusquement au fond et observa ce phénomène avec des yeux ronds stupéfaits. Il suivit la course lente de la boîte de céréale vers le placard qui s’ouvrit tout seul et se referma également ainsi. Puis le reste des verres et bols vinrent passer sous son nez pour atterrir en douceur et tout seuls, au fond de levier.

« Je vais dans ma chambre. »

Satisfait de ce qu’il avait fait, Timothey se retira et chercha donc sa chambre, Snow qui l’avait complètement adopté sur les talons. Alex une fois seule posa un regard perplexe et effrayé sur les bols et les verres qu’il avait bien vu voler tout à l’heure. Il se gifla mentalement, secoua la tête, et se passa ses grandes mains sur son visage.

Fuck ! C… c’est quoi ça ? Grommela-t-il décontenancé.
Il quitta à son tour la cuisine et trouva donc bien le jeune homme dans la chambre qui lui était destiné.

Hey ? C’était quoi ça . Ce que tu as fait .... Tu sais . Voler les objets . Dans la pièce ?
Il mima de ses grandes mains des trucs en train de planer et se déplacer. Il restait sur le pas de la porte et sur son visage un mélange d’effarement, de perplexité et un peu effrayé quand même.

C’est de la télékinésie . Un truc comme ça ? Tu sais qu’il n’y a jamais eu de preuve concrète de ce… don ? puis prenant conscience au vu de son vocabulaire, que Timothey n’allait rien piger de ce qu’il tentait de dire… Il soupira et se passa sa grande main sur son visage fatigué. Puis s’appuyant sur le cadre de la porte, croisant doucement les bras, il simplifia :

T’es vraiment capable de faire bouger des trucs . C’est ça ?

Dans la forêt, il n’avait pas clairement compris ce qui se passait. Une créature effrayante avait tenté de les attaquer. Dans l’obscurité, dans la fuite, dans le faisceau lumineux de sa lampe limité, il n’avait pas compris que Treize avait réussi en utilisant ce même pouvoir à la repousser.
Il n’avait pas réalisé que son invité était un être plutôt exceptionnel, doué d'une force mentale étrange. En tant que véto, il ne connaissait que l’explicable « scientifiquement et biologiquement » parlant évidemment. Alors que là… depuis cette nuit… toutes ses convictions, son assurance, ses connaissances venaient de voler en éclats. Il ne savait clairement plus quoi penser. C’était comme plonger dans une de ces BD Comics de super héros dont raffolent les mômes en ce moment.

« Oui, je peux faire bouger les objets, mais tu le sais déjà. Hier, j’ai empêché la bête de t’attraper, tu ne te rappelles pas ? »

Il secoua doucement la tête, plissant les yeux, fronçant les sourcils, affichant un air de réflexion perplexe et une certaine difficulté à bien se rappeler de ce détail.

C’était assez… confus dans le noir, j’ai cru que la bête avait reculé d’elle-même, effrayé par la lumière ou quelques choses comme ça. Il décroisa les bras et quitta son appui contre le cadre de la porte.

C’était si… Soudain et effrayant… Il avait connu des animaux dangereux dans sa formation, mais là… c’était le diable en personne. Il l’avait senti tout au fond de lui.

« La bête aussi a des pouvoirs, mais je ne suis pas comme elle. »

Des pouvoirs ?... Donc, cette créature n’était pas un animal connu… était-ce une sorte d’hybride ? Un truc créé par l’homme ? par des scientifiques fous . Était-ce même possible ?
En tant que biologiste, vétérinaire, il doutait que cela soit possible. Pas a cette échelle.

Tu ne sais pas son origine exacte . Si c’est animal . Humain ? Tenta-t-il quand même à savoir. Il ignorait que d’autres étaient déjà en mesure d’identifier la créature. Il avait un sacré retard par exemple sur le shérif Jim Hopper et même une bande de gamins.
Que cette bête cauchemardesque, tout droit sortie du pire film d’horreur de science-fiction, provenait d’une autre dimension bien réelle et connectée à celle-ci… à leur vie, leur existence. Qu’elle était une menace mortelle bien réelle.
Alexander quitta le pas de la porte et se rapprocha du lit pour y venir s’y poser, tout en l’écoutant parler de son don et l’origine de ce pouvoir.

« À la maison, je fais plein d’exercices sur ça, c’est dur. Je suis content d’être parti. Tu as peur ? Il y en a qui ont peur de moi. Mais je ne fais pas de mal. »

Il s’était assis sur le bord du lit et fixait le visage du jeune homme. Il semblait assez inquiet pour la suite. Alex faisait donc clairement le lien entre sa fuite de cet endroit horrible, ses pouvoirs et ce qu’il venait de dire. Ce n’était plus seulement un mec violenté, il devait être une sorte de cobaye, d’expérience. Putain… et cette créature de ce qu’il semblait comprendre n’était non plus pas étrangère à tout ça. Ça faisait beaucoup d’informations en peu de temps. Le véto se passa la main sur le bas de son visage, se frottant la mâchoire et puis il secoua doucement la tête d’un geste rassurant.

Non je n’ai pas peur de toi, t’en fais pas. peut-être un peu quand même, mais il ne voyait pas de menace dans ce regard face à lui, un regard tellement encore enfantin même.

« Je ne recommencerais plus, si tu préfères. »

Il posa doucement sa main sur son épaule frêle, la pressa doucement et lui sourit de façon avenante et rassurante.

tout va bien Timothey okay . Ce que tu arrives à faire avec… ce pouvoir, tout va bien. Par contre, je pense que tu ne dois pas trop le montrer. Va falloir se la jouer discret tu comprends ? un cobaye, il supposait qu’il serait certainement recherché. Maintenant à savoir d’où il venait vraiment et qui osent donc traiter un être humain de cette manière ?
Mais chaque chose en son temps, inutile de le cribler de questions.
Il allait faire sa petite enquête de son côté de manière plus subtile et après d’en savoir plus grâce à lui.

Tu restes ici aujourd’hui, tu ne sors pas okay . Tu iras prendre ta douche, je vais te mettre des vêtements propres dans la salle de bain. À midi je viendrais manger avec toi ici. Tu pourras regarder la télé si tu veux, j’ai des livres, des Bandes dessinées aussi. Snow restera avec toi. En parlant de lui, le chien squattait clairement le bord du lit, la tête sur les genoux de son nouvel ami.
Alex sourit et caressa la fourrure blanche de l’animal.

Vous êtes déjà très copain c’est bien. Bon je vais me préparer, je vais faire une rapide promenade à Snow et ensuite tu ne bouges pas d’ici ! Compris ? Il s’était relevé, marqua un temps le fixant très sérieusement et attendant son approbation à ses directives. Puis il fit signe à son chien de venir. Snow devait avoir une furieuse envie de se vider un peu la vessie.

La matinée du jeune véto allait être bien rempli, il se dépêcha de se laver, de s’habiller, déposa des vêtements propres pour Timothey et quitta son petit appart avec Snow sur les talons. Il était très tôt, un fin brouillard recouvrait les rues et avenues de la petite ville qui s’éveillait à peine. Après quelques pisses et la complète, il ramena le toutou à l’étage. S'était partie pour son travaille au cabinet.